Elodie Couillard : « nous souhaitons que le N’Djam Hip-Hop puis perdurer »
Depuis 5 ans déjà, le Centre Culturel Français de Ndjamena organise le N’Djam Hip-Hop, un évènement culturel majeur qui permet à la scène hip hop locale de s’exprimer et d’échanger au contact de nombreux artistes internationaux invités chaque années. Présent à Ndjamena kamerhiphop a rencontré Elodie Couillard, chargée des missions culturelles au CCF, elle nous parle du N’Djam Hip-Hop 2010.
kamerhiphop.com : peux-tu nous faire une présentation du N’Djam Hip-Hop ?
Elodie Couillard : Le N’Djam Hip-Hop est un festival né au CCF de N’Djamena voilà 5 ans… Il ne nous reste malheureusement plus beaucoup d’archives, suite au pillage du CCF lors des événements de février 2008. Ce N’Djam Hip-Hop, organisé tous les ans en février, reflète l’effervescence de la scène Hip-Hop tchadienne et plus largement le dynamisme des cultures urbaines au Tchad. C’est pourquoi, toute l’équipe du CCF travaille activement à la pérennisation de ce festival. Nous souhaiterions en effet, qu’au-delà de la présence française au Tchad, le N’Djam Hip-Hop puisse perdurer et devenir, de plus en plus, un événement porté par les tchadiens pour les tchadiens.
Quels sont les ajouts pour cette édition 2010 ?
En ce sens, et depuis 2007, le festival est co-organisé par des opérateurs locaux. C’est le RECAF (Réseau Culturel et Artistique pour la Formation et la Francophonie), dirigé par Manassé Ndoua, qui a ouvert la danse en proposant d’intégrer les sélections tchadiennes du GABAO de Libreville à la manifestation. Cette année, c’est Djamel Productions, qui a créée les Hip-Hop Awards Tchad en 2009 qui nous rejoint pour l’organisation d’un atelier Graff’ notamment. Ce nouveau partenaire constitue la principale innovation 2010 et nous espérons que le cercle s’élargisse encore dans les années à venir.
A noter également, nous avons cette année un groupe de la sous-région qui s’ajoute à la programmation franco-tchadienne des années précédentes, avec les camerounais du collectif Sahel Hip-Hop de Garoua. Nous espérons que cette invitation d’artiste(s) d’Afrique Centrale perdurera lors des prochaines éditions.
Au niveau de la programmation artistique, quels sont les invités ?
Au niveau international, nous accueillons cette année un invité très prestigieux puisqu’il est champion de France et du Monde de breakdance. Il s’agit de Junior Bosila, danseur de la compagnie Wanted Posse, établie en France. Junior nous a présenté son solo Buanattitude en ouverture du N’Djam Hip-Hop 2010. Il y revient sur ses origines congolaises de Kinshasa et sur ses différences, qui plus que des obstacles ont constitué sa force tout au long de son parcours artistique. Il mène également un atelier avec 6 danseurs Hip-Hop des groupes JDK et Nacdoro, bien connus ici.
D’ de Kabal nous rejoindra lui pour présenter son duel de slam et de percussions en compagnie du musicien improvisateur Franck Vaillant le vendredi 19 février. D’ de Kabal, figure historique de la scène rap française s’est intéressé ces dernières années à d’autres disciplines artistiques comme la danse, le théâtre et le slam. Il excelle désormais dans ce genre avec sa voix singulière, grave et étrange et tentera de partager son expérience au cours d’un atelier.
Les représentants du Cameroun voisin, les membres du collectif Sahel Hip-Hop, nous feront partager leur univers Hip-Hop teinté de couleurs sahéliennes le vendredi 5 février. Ils ont accepté de mener auparavant un atelier destiné aux jeunes rappeuses de N’Djamena, qui font tout récemment leur apparition sur les scènes tchadiennes.
Et bien sûr, à travers les sélections GABAO organisées dans les quartiers et au CCF, vous pourrez retrouver le meilleur du rap tchadien avec les groupes Makryst, Tri-Ad, Prince DEE, Ray’s Kim, 2D Kost, Big Alias X, Daïs’Son, Teddy Sunshine, Dah-Zia, KKJ, Sydney, Wassalna, Samuraï et Decibel…
Enfin, n’oublions pas un atelier de graff’ animé par les tchadiens Chrisly et Paulin Preston, une programmation cinéma dédiée et un reportage en images du photographe Tchadien Abdoulaye Barry (récemment Prix Spécial du Jury aux Rencontres Photographiques de Bamako).
Quelle place occupe les rappeuses dans la programmation de cette édition 2010 ?
Les rappeuses sont un « phénomène » nouveau à N’Djamena. Jusqu’ici, seules quelques jeunes femmes s’étaient essayées à ce genre musical. En effet, il n’est pas évident d’être artiste au Tchad. Ce statut n’est pas souvent considéré positivement ici, ni par les familles, ni par la société en générale. Autant dire que pour les femmes, c’est encore plus difficile d’imposer son art comme un choix de carrière et de vie.
Malgré tout, depuis mon arrivée au Tchad, j’ai vu quelques filles poser leur flow sur les scènes de la capitale. J’ai entendu parler d’autres qui se produisaient dans les maisons de quartier. L’idée nous est alors venue d’essayer de les rencontrer et de les accompagner à travers un atelier. Le collectif Sahel Hip-Hop comptant lui-même quelques représentantes féminines a accepté de se lancer dans l’aventure à nos côtés.
Les jeunes rappeuses seront invitées à monter sur scène en première partie du concert de Sahel Hip-Hop. Rendez-vous le 5 février pour mieux les découvrir !
Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face ?
Comme tous les opérateurs culturels un peu partout sur la planète, et notamment en cette période de crise économique, nous peinons parfois à trouver les financements nécessaires à l’organisation de ce type de manifestation. Le N’Djam Hip-Hop a trouvé un partenaire financier fidèle à travers l’opérateur téléphonique Zain. Mais nous avons des difficultés à convaincre les autres bailleurs privés de se lancer à leur tour dans l’aventure, et ce malgré la pérennisation du N’Djam Hip-Hop et son succès tous les ans renouvelé auprès des artistes et du public.
Un dernier mot pour les internautes de kamerhiphop.com ?
Nous sommes contents de pouvoir mieux faire connaître le N’Djam Hip-Hop, ici, sur le site kamerhiphop.com. Nous espérons que les camerounais viendront nous rejoindre en nombre pour cette édition !!! Et n’oubliez pas, si vous ne pouvez pas venir en février et que vous passez à N’Djamena entre le 9 et le 20 mars, faites un tour au CCF pour revivre le festival en images, à travers l’exposition du photographe Abdoulay Barry !