Le rap kamer à la loupe de Nick B : Trop stars pour vivre

Ils ont sorti un album, connu du succès, aligné quelques spectacles avec des grosses pointures. Puis, stop. Plus rien. A la cité verte (leur base d’ongola), on les disait au Sénégal. Il y’a un an, ils ont annoncé leur retour dans les bacs. Kwalo’o, leur guitariste, a fait diffuser son single sur une radio de la capitale. La moutarde n’a pas pris. Et la résurrection de Negrissim n’a pas eu lieu.
Ils ont sorti un album, connu du succès dans leurs familles, produit deux ou trois spectacles. Puis, back out. Disputes et dissensions ont pris le dessus. Le groupe s’est disloqué. Le mois dernier, Peet-C, ex membre du collectif, a vomi sa rage vis-à-vis des autres membres du groupe dans je parle de ma vie. Peu reluisant. Peu convaincant. En tout cas, insuffisant pour raviver le souvenir du Natural DC.
Ils n’ont jamais sorti d’album, mais ils connaissent un certain succès avec le titre « l’envol ». ils arrachent des salves d’applaudissements à chaque show et leur chanson phare figure dans la compil Dream. Il subsiste cependant le risque que le public se lasse d’un groupe incapable d’un « autre coup de génie » et, le moment venu, n’achète plus cette chanson trop entendue. Y aura-t-il alors un envol du C-MINAIRE ?
Les exemplaires sont légion. Ils masquent tous la même réalité : l’incapacité de nos rappeurs à soutenir un plan de carrière durable. Ils tardent à démontrer qu’ils peuvent se maintenir au top niveau pendant cinq ans. Ils semblent loin de pouvoir publier trois albums. Pour la plupart, ils disparaissent de la scène aussi vite qu’ils y arrivent. « la faute aux producteurs et managers qui ne croient pas en nous » avancent certains. Mais, même pour ceux qui bénéficient de la manne de quelque sponsor, tout se passe comme s’ils ne sont préoccupés que par la gloire passagère d’un titre, d’un spectacle, d’un passage à la radio/télé ou d’un album unique.
L’équation de la facilité, pour eux, n’a pas d’inconnues. Niveau I : s’offrir un nom d’artiste bazarroide, une coiffure extravagante, quelques tatouages et une tenue excentrique ; adopter un ton agressif
Ou un langage ordurier ; contester tout et n’importe comment ; dénigrer tous ses confrères (même si, secrètement, on les copies), etc.Il s’agit avant tout de se convaincre qu’on est différent, unique.
Niveau II : griffonner quelques inepties sur du papier. On appellera ça « textes » et il s’en trouvera un Disc Jockey (DJ) pour habiller l’ensemble des bruitages pompeusement baptisés « beats ». une maquette est prête. Une « star » est née. Quel projet artistique ? quelle innovation ? questions superflues. L’important, c’est d’aller d’anniversaires en soirées culturelles se persuader qu’on « a le niveau ». si, en plus, nos « rappeurs » se retrouvent sur un plateau Kamergroove ou ça me dit rap, s’ils s’entendent à la radio ou passent à la télé, leur « point d’achèvement » artistique est atteint. Plus besoin de conseils. Ils savent tout. Inutile de travailler d’avantage. Ils n’attendent plus rien du lendemain. A ce stade, la créativité est en baisse et le sentiment de supériorité sans cesse en hausse. Nos toasteurs se prennent pour DR Dre ou Eminem alors même qu’ils n’ont pu boucler véritablement leur seul et unique album. Ainsi, s’accrocheront ils à vie à la gloire de leur titre phare, de leur première maquette ou opus.
Il faut reconnaître : trop de maquettes mais trop peu d’albums rap au kamer, ce n’est pas seulement la faute aux producteurs. Trop de k-mer rappeurs sont trop stars pour fournir l’effort d’œuvres durables et de qualité.
100%jeune – le journal – juillet 06 – n°068