Gaëlle Moudio : Le rap camerounais n’a pas encore trouvé son identité.
Ancienne présentatrice de l’émission 100%, Gaëlle Moudio est depuis un an journaliste dans le magazine Situations. A la fois Manager du rappeur Valsero et amoureuse du hip hop, elle nous donne ses impressions sur ce mouvement.
kamerhiphop.com : Bonjour Gaëlle Moudio. Alors comment te sens tu dans ta peau de journaliste ?
Gaëlle Moudio : Très bien, Merci. Aussi loin que je me souvienne, cela fait partie des métiers que j’ai toujours rêvé d’exercer, alors c’est cool.
Est-ce facile d’abandonner le micro pour la plume ?
Non, pas du tout. En fait c’est même un choix cornélien. C’est pourquoi je n’ai pas choisi. Je n’ai pas abandonné le micro, parce qu’il n’est pas incompatible avec la plume. En plus de la radio, je fais même le Mc, et très bien ! Alors…
Je sais que ce n’est pas facile pour un jeune d’intégrer un magazine aussi sérieux qu’est Situations. Alors comment t’as fais ? raconte.
Je me suis contenté de bosser, et j’ai eu la chance de faire de bonne rencontre. C’était dans les couloirs de Mutations. Un hasard, une rencontre avec le boss, un brin d’impertinence et de spontanéité. Je crois que ça lui a plu. Il a voulu en savoir plus. Je n’ai pas hésité à saisir ma chance et à étaler tous mes talents. Et voilà !
Il se dit que dans ce métier l’ascension des femmes est généralement conditionnée par leur soumission au droit de cuissage. As-tu souffert de cela ?
Je peux pas dire que ce sont les tentatives qui ont manqué ; l’essentiel c’est de savoir ce que l’on veut et en quoi on croit. Moi je trouve toujours la bonne parade pour me défaire de ce type de sollicitations. Il faut surtout être prête à perdre des opportunités. Avoir envie de réussir par son talent et pas par son corps. Le respect qu’on voit dans le regard de ses pairs, c’est important pour moi.
Peux tu me raconter ta journée de travail à Situations ?
Oh, ça varie beaucoup. En fonction des rendez-vous. Mais minimalement c’est ceci. Premier contact avec un ordinateur, 8h30, puis divers rendez-vous pour préparer les articles, après-midi, re-contact ordinateur pour rédiger tout ça. Stop vie une heure ou deux avec des copains pour relaxer un peu les nerfs, puis retour sur l’ordi. En début de semaine, cela peut aller jusqu’à plus de minuit.
Tu côtoies le hip hop camerounais depuis une dizaine. Quel regard jettes-tu sur ce mouvement ?
Notre hip hop va comme notre pays. La tête en bas. On n’a pas encore compris ce qu’est le mouvement hip hop. Il y a très peu de gens qui savent. Notamment dans la classe de ceux qui se disent pratiquant ou promoteurs. C’est dommage de se faire guider par des aveugles. Ca donne ce qu’on voit là du hip hop à l’eau de rose, ou moins que ça. Heureusement qu’il y a en quand même quelque uns qui nous montrent le chemin et nous donnent l’impression que ça va finir par s’arranger. Mais je crois qu’il fut qu’en fin les amoureux du hip hop s’investissent dedans. Le hip hop ne saurait être une échoppe. On mérite mieux que ça !
Que penses-tu des deux tendances de Rap au Cameroun : Rap Mboa et Rap puriste.
Je crois que c’est un faux débat qui est propre à notre pays et qui vient du fait que beaucoup n’ont pas compris. Il n’y a pas de rap Mboa. Le rap est une culture urbaine, c’est à dire qu’il se développe dans un lieu précis, fortement nourri et influencé par les réalités et le contexte de ce lieu. Partout le rap est Mboa. C’est donc une lapalissade. Le rap est aussi un. Il est quelque chose de précis qui se reconnaît malgré les diverses influences locales qu’il peut subir. Pourtant chez nous on en arrive à ne même plus le reconnaître. C’est dommage ! c’est simplement la preuve d’un certain manque de culture musicale. La pop n’est pas le rap. Vous connaissez Orishas ? n’est-ce pas là du rap Mboa à la cubaine ? Est-ce que vous doutez que ce soit du rap pour autant ?
Comment trouves tu le hip hop camerounais par rapport au hip hop Gabonais, Sénégalais,… ?
Un tantinet à la traîne. Avec les talents que nous avons, il y a de quoi passer largement devant. Mais là où ils nous dépassent, c’est que leurs dirigeants savent que le rap existe, ils y croient et sont capables d’y investir ; jusqu’à un milliard pour certains. Je viens de voir une rappeuse gabonaise, dont le talent n’atteint pas celui de notre Lady B nationale, venir lui griller la préséance ici au Massao, et se faire traiter en princesse par son pays qui lui tout fourni pour vivre ici, à la barbe, tranquille.
Selon toi, quel est (ou quels sont) le ou (les) maillons faibles de ce mouvement ?
Je les ai presque tous cité : le culture générale ou musicale, le manque de professionnalisme, le manque de foi, et d’investissement…Le rap camerounais n’a pas encore trouvé son identité. Ni ses mécènes.
Comment vois tu ce mouvement dans 10 ans ?
Sauf s’il y a du changement, on sera bientôt chassé des grands rendez-vous de rap. Je rigole peut-être mais si ceux qui tiennent la flamme ne se battent pas plus que cela ça va être chaud pour nous. Je le redis, il faut que des connaisseurs s’investissent pour donner au mouvement camerounais une vraie quintessence.
Je sais que tu manages le rappeur Valsero. Alors est ce facile de bosser avec cet artiste « rebelle » ?
Bien sur que non ! Mais qu’est-ce que vous croyez ? Qu’est-ce qui est facile ? Doit-on abandonner le chemin du talent sous prétexte que ce n’est pas facile ? Les artistes camerounais ont besoin de faire un travail sur eux, d’apprendre à savoir qu’ils ne sont pas des bidets sur lesquels tout le monde vient chier. Mais aussi à ne pas être des rebelles pour la forme. Il faut se professionnaliser. Voilà ce que j’essaie de lui apporter. Tout le monde peut le voir : il a quelque chose que très peu d’artistes ont dans notre pays. Nous gagnerions tous à ce que ce soit mis en lumière. Et j’y travaille. Quoi qu’il m’en coûte.
Ton mot de fin ?
J’en ai pas. Rien n’est fini.
Gaëlle Moudio A COEUR OUVERT
Ta vertu préférée ? Le talent
Le principal trait de ton caractère ? La vivacité d’esprit
Les qualités que tu préfères chez les hommes ? Le talent, l’humour, l’anticonformisme et aussi de belles mensurations
Les qualités que tu préfères chez les femmes ? La sincérité, l’humour, la classe.
Ta principale qualité ? La générosité
Votre principal défaut ? L’entêtement
Ton personnage historique ? Nelson Mandela
La faute que tu ne supportes pas ? L’accumulation des fautes
L’être qui a le plus compté dans ta vie ? Queen Alexandra Vika (ma fille)
Ton meilleur souvenir ? L’instant de sa venue au monde
Ton pire souvenir ? Une opération chirurgicale que j’ai du subir il y a quelques années.
Ta devise ? Vivre sa vie, jouir de la vie
Ton plat préféré ? Tant que c’est bon, j’adore.
Comment aimerais tu mourir ? Après avoir accompli ma mission et fait mes adieux à ceux que j’aime.
Ton signe astrologique ? Taureau
Quelle image voudrais tu que les gens gardent de toi ? L’intelligence et la persévérance dans les combats que j’engage.
Quels sont tes loisirs ? Lecture, télé, sport, musique en cabaret…