hip hop : Echauffement ou essoufflement ?
La chaleur s’est estompée. L’enthousiasme s’est enrhumé. Le génie s’est émoussé. Et les bons micros se sont éteints. Là où il résonnait la symphonie de la créativité, s’est installée la cacophonie du réchauffé, le «beat» ennuyeux et ennuyant du copier-coller. La scène, pourtant, bruite toujours. L’arrière scène bruisse encore de talents. Mais l’avant-scène brouille la dynamique, ne répercute plus assez l’écho. Des fois, on veut croire qu’il ne s’agit que d’une mauvaise passe. Que demain sera meilleur. Mais, demain, c’est quand ?
Les meilleurs ouvriers ont pris des congés alors que les travaux de construction du hip hop camerounais rentrent dans leur phase optimale. Patrick Ermano s’est exilé. Emportant avec lui le souci permanent d’innovation et l’art d’apprivoiser la technologie. Eric-Christian s’en est allé avec ses tenues soignées et son élégance verbale. Dania nous a sevrés de sa grande culture et ses jeux de mots succulents. Ebah Essongue tarde à étendre son rayonnement professionnel au-delà du septentrion. Inès T. et Michel Enyegue ont succombé aux charmes de Mammon (l’argent), mettant leurs carnets d’adresses et leur pugnacité au service d’autres causes….Tous les guerriers de la communication mass media semblent s’être essoufflés, fatigués avant même que la bataille ne soit remportée. Que nous reste-t-il, ou plutôt, QUI nous reste-t-il à proprement parler ? L’excellent Tito et l’infatigable Taphis, bien sûr ! Mais, pour combien de temps encore ? Si l’on s’en tient à l’histoire récente, un communicant surmédiatisé du hip hop reste difficilement fidèle à sa discipline originelle. Deux ou trois ans au sommet, puis il s’en va ! Tout se passe comme s’il se sentait subitement à l’étroit, comme s’il ne trouvait pas le retour sur investissement intellectuel et temporel espéré, comme si les terres du hip hop étaient trop arides pour laisser pleinement germer son génie. Ainsi, progressivement, Tony Nobody a édulcoré l’éclat de son émission «Mboa» au profit d’autres déclinaisons (Mboa Come Test, Mboa Hip Hop Awards), initiatives (Ba’doul), et collaborations peu ou prou proches du hip hop mais probablement plus lucratives. Depuis le lancement du site «Cultures Ebène», Idrissou est résolument englué dans le paradoxe du polygame mais semble avoir pris le parti de la seconde (et nouvelle) épouse. La preuve : un flagrant déséquilibre promotionnel entre www.culturebene.com et www.kamerhiphop.com sur sa page Facebook, alors même qu’il est l’animateur des deux plateformes. Inutile de chercher midi à quatorze heures : d’un double point de vue artistique et thématique, et bien au-delà de la nouveauté, le premier site cité ratisse large tandis que le second parait limité à un champ «élitiste», au marché peu porteur. Aussi, personne ne s’offusque plus du contraste entre la fraicheur des informations de «Cultures Ebène» et l’afflux de chroniques «réchauffées» ou piquées d’ailleurs sur «Kamerhiphop». Les promoteurs ont choisi leur camp. Y entrainent les lecteurs. Et il n’y a plus que le jeune Felix Tatla pour tenir allumée la flamme de la passion réflexive….en attendant d’être rattrapé lui-même par la «dictature du quotidien». Une trajectoire connue par Ebah Essongue, désormais aux ordres de Arterial Network. Une trajectoire que pourrait bientôt connaître Taphis qui caresse l’ambition d’ «élargir son horizon» (relisez l’expression) et d’ouvrir prochainement une agence de communication.
Cette chronique a-t-elle quelque chose contre la diversification ? Aurions-nous une aversion pour l’ambition ? Que Nenni. Nous militons et avons toujours milité pour un hip hop plus grand, plus haut, plus fort. Nous espérons d’ailleurs que les «départs» ou excursions de nos médiateurs vers d’autres sphères leur permettent plus tard de revenir mieux servir la scène hip hop. Simplement, par le texte que vous venez de lire, nous exprimons notre crainte que la «démission» des communicants soit motivée par le refus d’affronter, pour le changer, un ordre opaque. Que leur gout du lucre sucre leur passion. Que devoir «mettre la marmite au feu» SEUL, serve de prétexte à la diversification. Auquel cas ce ne sera plus de la diversification. Mais, juste de la diversion.
(Texte dédié à Felix Tatla M.)