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mardi, avril 23, 2024
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Pambo Mubeli [Iseehigh] : « Le slam est belle façon de se reconnecter à notre source originelle »

Gabon terre de slam. L’oralité urbaine connait une véritable renaissance au pays du bleu-blanc-vert. Expatrié en ce moment aux USA, Pambo a.k.a Iseehigh est un des précurseurs du slam au Gabon et membre fondateur du très célèbre label Zorbam. Rencontre avec ce khémite slameur d’un autre genre qui met son savoir au service du verbe. 


Pambo, Iseehigh…on ne sait plus trop comment t’appeler…
Disons qu’avec l’âge on a appris à  « désamericaniser » pour embrasser totalement ce que nous sommes et à ce titre je préfère qu’on m’appelle Pambo Mubeli, ce nom est certainement celui qui me cerne le mieux dans ma complexité d’homme khemite vivant sur terre en 2010 (rires)


Comment es-tu arrivé dans l’univers slam ?
Disons que l’écriture est certainement la chose qui me passionne le plus. Et je suis tombé dedans très jeune d’abord par le rap (Poetic Justice) puis le chant (Poetic Ganxtaz) et enfin  la poésie (Nyabinghi Poésie). Mon contact avec le slam proprement dit remonte aux années 90 via le film slam et des ateliers que nous tenions à l’Université de Libreville pendant lesquels on déclamait sans fond musical.


Tu es l’un des précurseurs du slam au Gabon. Parle-nous un peu de la genèse de cet art dans ton pays
Mes compagnons d’armes et moi même (Zorbam Produxions, MH, Nyabinghi Squad) étions ensemble à Nantes en 2004 lors du premier grand slam français. Nous avions déjà quelques idées sur la manière d’importer cet art au Gabon mais je crois que ce grand slam de Nantes auquel prit part mon frère et compagnon de route (Dia Alihanga pour ne pas le citer) a été l’évènement catalyseur. Rentré au Gabon quelques mois plus tard je me suis attelé à négocier une collaboration avec le CCF de Libreville. Nous avons donc placé une programmation pour des ateliers d’écriture et de performance poétique c’était en 2004. Cela a commencé timidement car personne ne connaissait cet art au Gabon. Nous avons fait le tour des medias, tv et radio puis peu à peu accueilli nos premiers poètes. En décembre de cette même année nous avons lancé les premières journées de l’Oralité qui reste à ce jour un évènement annuel qui se tient au CCF de Libreville. Depuis cet art a fait des centaines d’adeptes et est connu et reconnu comme une discipline à part entière.


Tu es le fondateur du Nyabinghi Slam devenu Nyabinghi Poesie. Quel est l’esprit  (ou le projet) de la poésie Nyabinghi ?
Disons qu’au départ nous avons été séduits par le mouvement slam comme élément de démocratisation du verbe qui donne un accès libre à la prise de parole. Très tôt nous nous sommes rendu compte que certains ont voulu nous inféoder dans une forme de poésie encadrée par des lois qui ne trouvaient aucun sens dans notre environnement propre. Persuadés que nous n’avons pas à nous inscrire dans une logique du mimétisme aveugle nous avons décidé de nous désolidariser du SLAM au sens strict du terme. Nous avons donc conçu le concept Nyabinghi Poésie. Nous sommes une civilisation dans laquelle l’oralité revêt un sens très particulier et nous pouvions continuer de recevoir des leçons de pseudo-poètes guidés par une vision mercantiliste de cet art. Le projet du Nyabinghi Poésie est de réconcilier les nôtres avec cette oralité millénaire qui nous est propre.


En tant Africain pratiquant un art par si différents des arts oratoires traditionnels millénaires,  quelle est ta vision du slam ?
Disons que le slam (la POESIE ORALE en général) doit pouvoir s’adapter au contexte dans lequel il vit. Le poète gabonais, le poète français et le poète américain ont des réalités différentes, des sensibilités différentes et la poésie doit être à l’image du poète. Nous autres africains en plus d’avoir inventé les premières formes d’écriture sommes aussi une civilisation de l’Oral et pour moi il n’y a pas une très grande différence entre l’art des griots et l’art des poètes urbains. La forme évolue mais la substance est assurément la même. Le slam (la poésie orale en fait) est ainsi une belle façon de se reconnecter à notre source originelle.


Malgré la volonté des slameurs africains, le slam ne figure pas toujours en bonne place dans la programmation des festivals, centre culturels… Où réside le problème à ton avis ?
Le problème réside dans le fait que cet art reste très peu connu. Il appartient aux poètes de s’activer et faire vivre cette discipline. Mais que cela soit clair, la position de précurseur est une position ingrate car tout le monde vous regarde de travers au départ et lorsque vous avez fait le plus dur certains montent au créneau et viennent récolter à votre place le fruit de votre labeur. Il ne faut donc pas attendre de reconnaissance de la part de qui que ce soit, il faut vraiment le faire par passion car autrement ça ne marche pas, c’est notre réalité, il faut composer avec. Avoir cette passion et ne pas baisser les bras devant les obstacles inévitables que vous trouverez en chemin.


Une autre approche pourrait être de commencer à vous lier à des poètes d’ailleurs, établir des connections et vous organiser en marge de ce qui se fait localement, faites votre propre « truc » et une fois que vous serez suffisamment connu par le public, les acteurs culturels ne pourront plus vous ignorer.


 
Comment démocratisé et faire accepter le slam par tous finalement ?
Ben à chacun sa méthode, osez votre propre approche. Il y’a partout des jeunes qui ont la passion de l’écriture, trouvez-les. Donnez leur envie de sortir de leur intimité et partager leurs écrits. Il y’a des poètes nés que la poésie orale va permettre de ressusciter. Visez les établissements scolaires, mettez l’accent sur l’écriture, organisez des concours de poésie. Présentez-vous comme une alternative à la poésie traditionnelle et trouvez des alliés dans votre environnement immédiat (professeurs, animateur TV, radio, etc.) au bout du compte on y arrive toujours.


La vidéo du titre Infini t’a révélé aux internautes camerounais, que veux-tu traduire dans ce titre qui est une métaphore pas toujours aisée à comprendre dès la première écoute ?
Je ne savais pas que cette vidéo était connue au Cameroun je suis flatté. Infini est une métaphore filée en effet. Disons que j’ai essayé à ma manière de décrire deux réalités en une. Infinie pourrait être un voyage astral, une exploration de l’univers (voyage initiatique bwiti après manducation de la plante sacrée « Iboga ») mais  c’est aussi la description de ces quelques secondes de plaisir pendant l’acte sexuel avec la personne qu’on aime, ce qu’on nomme la « jouissance ». Ce sont ces deux réalités que je voulais essayer de décrire. Mais au final chacun comprendra ce texte en fonction de sa propre sensibilité et ce n’est pas plus mal (rires)


Tu es président du label Zorbam Producxion. Parle-nous un peu de cette structure et de vos réalisations à ce jour
Disons que je suis pour le moment expatrié aux USA donc la présidence du label est assurée par mon frère Dnice. Par contre le label ne dort pas. Fidèle à notre credo on avance en indépendant. Zorbam est un des plus anciens et un des labels les plus prolifiques au Gabon. Nous avons depuis 10 ans offerts au public des albums comme Bienvenue à Lbv du rappeur Lestat XXL, nous avons dans notre écurie un des groupes phares de la scène Hip hop en Afrique (le groupe Movaizhaleine). Zorbam a récemment permis l’ouverture du BANDJA premier centre culturel africain en France (Nantes), nous avons sorti l’album du jeune rappeur Rod Nzeng (Dr Zeng) et dans quelques mois le second album solo du rappeur Lord Ekomy Ndong (du groupe Movaizhaleine), un des albums les plus attendus par les fans gabonais. Parallèlement nous avons nos poètes qui ont participé à une tournée des CCF d’Afrique centrale et certains dont le jeune Buumhiks qui prend part en France à un projet alliant théâtre et poésie. Bref, on reste actifs!


Ecoutes-tu du rap ou du slam camerounais ? Si oui, quels sont tes préférés ? J’ai écouté du rap Camerounais notamment RACINE si je ne me trompe pas ainsi qu’un poète assez intéressant dont je ne retiens pas le nom. Malheureusement l’art ne circule pas assez sur le continent et c’est dommage; mais si vous pouvez me faire suivre des albums et des sites web je suis preneur; je suis pour la découverte d’autres artistes.


Quels sont tes projets à venir et un contact ?
Pour le moment le BANDJA est notre principale actualité, vous pouvez rejoindre le groupe sur FACEBOOK (Le Bandja). Moi je suis joignable sur  msn : iseehigh@hotmail.com sur Facebook (Amoan Pambo) et voilà, tu as mon numéro de portable, sinon je suis sur Blackberry messenger envoyez moi une invitation via l’adresse email ci-dessus voilà.


Merci broth’art
C’est moi qui te remercie EBAH. Big up aux internautes de Kamerhiphop, aux mc’s et slameurs camerounais , A mes frères d’armes, Movaizhaleine, Lestat XXL, DIA ALIHANGA, PGC FOR LIFE, WHY DAMAJA, ROD NZENG, DNICE PAMBO, MUDJAH SOULJERZ, NYABINGHI POESIE, AU CAMEROUN, AU GABON, A NOTRE CONTINENT, AUX MIENS, A Ma reine nubienne et mon fils…you know what it is!

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